Rien à voir

Pourquoi je célèbre toujours le 8 Mars… et pourquoi cette année encore plus !

Le 8 Mars est la journée Internationale des Droits des Femmes. Parce qu’on est bien forcé de choisir des dates pour rappeler souvent des évidences qui ne devraient pas en avoir besoin. Comme par exemple que les droits des femmes, ben on est encore très loin d’avoir fait de ce principe une réalité acceptée et consensuelle. Parce que pour le moment, c’est des droits qu’on viole autant qu’on viole les femmes, parfois sans même s’en cacher et sans honte. Les Droits des Femmes est un combat qui dure depuis 130 ans, et en ce moment, c’est un combat qui saigne, un combat à mort. Un combat à l’issue de plus en plus incertaine, qui s’est emballé depuis l’année dernière, et qui prends des allures de guerre ouverte de la part de tout les réacs et néo-conservateurs (je suis gentille, j’emploie pas le terme juste : gros connards sexistes).  Non parce que là, c’est la marche triomphale de l’alliance sacrée des réac’, des rétrogrades, des grenouilles de bénitiers les plus faux-culs  et des sexistes les plus assumés, qui se gonflent de leurs victoires de par le monde, depuis un an. L’année dernière, y’avait une grande victoire. Maintenant, on ne les compte plus dans leur camp. Et bien sûr, ce n’est que la partie la plus visible de leur lutte. Celui qui discrimine les femmes ne va pas se gêner avec les trans et les pédés, avec les noirs et les arabes. Il veut détruire la liberté de ne pas être comme lui… il veut tout simplement détruire la liberté.

En ce moment, c’est la sortie des drapeaux de l’Internationale du suprématisme blanc à couilles, le seul être qui compte sur cette planète à leurs yeux. Et ô joie, leur pire ennemi est le suprématisme musulman extrémiste, qui pense exactement pareil, a exactement les mêmes idées, la même violence… sauf qu’en ce moment, un groupuscule monstrueux s’est donné le droit et les moyens de faire étalage de ses idées de civilisation à coup d’esclavage, de massacre, de viols et de religions. Du pain béni pour les potes à Trump, Le Pen, Wauquiez et clairement Macron, mais c’est désormais plus de la moitié de l’Europe réactionnaire et liberticide qui triomphe. Du pain béni pour écraser tous les droits, y compris les plus inacceptables de tous pour eux : le droit des femmes à ouvrir leur gueule à égalité avec eux.

Alors, voilà : ce qui suit n’est pas pour mes amis, collègues et camarades féministes, antiracistes, progressistes, militant LGBT, humanistes, écologistes…

Non, il est pour les autres… ceux qui vivent leur vie en pensant être loin de tout cela… Je le dédie à vous, qui pensez que ça n’arrivera pas ou qu’on a pas besoin de vous, ou que c’est inutile de lutter :

Un jour, ils asserviront la dernière femme ; ils enfermeront le dernier penseur progressiste ; ils brûleront le dernier savant ; ils lapideront le dernier pédé ; ils ghettoïseront le dernier homme de couleur ; ils écorcheront le dernier athée et ils regarderont mourir de faim le dernier pauvre.
Alors ils assécheront la dernière rivière, asphyxieront la dernière mer, tueront le dernier oiseau, le dernier poisson, le dernier animal sur Terre. Ils laisseront fondre les glaciers et désertifier les plaines, ravager les villes et brûler les villages. Et pendant ce temps, ils pomperont jusqu’à la dernière goutte de pétrole et le dernier souffle de gaz et en feront leur tapis d’or.
Puis il n’y aura plus rien, alors ils se retourneront les uns contre les autres, pour savoir qui est le plus fort et qui a le plus puissant dieu. Et puis l’un d’eux déclenchera l’arme atomique, les autres feront de même et alors adviendra exactement leur souhait le plus intime, leur désir de mort. Ils auront leur Fin des Temps.
Et nous pouvons, nous seulement, les en empêcher…

 

En 1949, Simone de Beauvoir écrivait Le Deuxième Sexe, essai en deux tomes, un brûlot qui mis le feu à la société européenne et américaine en moins d’un an, et fut même mis à l’index par le Vatican. Que contenait ce livre ? La description d’une société machiste, sexiste et patriarcale maintenant la femme en posture d’infériorité, analysé à travers l’histoire répétée des civilisations ; il expliquait surtout, inspiré par la philosophie existentialiste de son auteure, qu’il n’y a pas de déterminisme et que c’est la société qui conditionne la place de la femme, non sa nature. Ce livre est devenue la bible des mouvements féministes des années 60 et jusqu’aux années 80. Simone de Beauvoir a enfoncé une porte blindée et l’a démolie pour laisser passer tous les courants et toutes les aspirations féministes à cette égalité dont je parle plus haut. Et puis elle s’est éteinte en 1986. Le mouvement, lui, a tenu bon.

Enfin, c’est ce qu’on croit, en 2018 ; ça commence à sonner de plus en plus faux. La plus importante citation de cette grande féministe, que son père décrivait en disant : « ma fille a un cerveau d’homme », est celle-ci : « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant. » Depuis quelques années on est en plein dedans. Et depuis quelques années, jamais plus fort ne s’est fait entendre cette sentence merdique comme une négation de l’intelligence : « mais y’en a marre du féminisme, y’a des choses plus graves dans le monde. »

Simone de Beauvoir doit tellement se retourner dans sa tombe en ce moment qu’en y mettant une dynamo, on devrait pouvoir éclairer tout Paris. Ho, soyons clairs, le refus de l’intelligence ne frappe pas que ce sujet ! La caractéristique étrange d’Internet est de diffuser la bêtise incommensurablement plus vite qu’il n’y diffuse de l’intelligence. En ce moment, la pensée raisonnée, la réflexion posée, les principes les plus élémentaires de la philosophie et de l’esprit éclairé, tout le monde s’en tape le fion. Pour la citer encore, Simone de Beauvoir résumait dans les années 60 : « Le principal fléau de l’humanité n’est pas l’ignorance, mais le refus de savoir. ». Internet devait être un formidable outil culturel. Il est une machine à se dispenser de penser.

L’égalité des droits, des devoirs et du respect pour les femmes est une lutte pour l’égalité de tous les êtres. Mon combat personnel pour le faire progresser englobe la lutte pour les droits des minorités, des peuples de toutes les couleurs, de tous les genres et de toutes les sexualités. Je ne peux pas être selon moi féministe et me déclarer raciste ou admettre sans me coller la pire des hontes de faux-cul être homophobe. C’est un tout. C’est un concept général englobant une seule pensée : le progrès du droit et du respect dévolu à tous les êtres humains. Et cette lutte pour ces droits file une trouille bleue à ceux qui ont besoin de se sentir avoir un pouvoir, être supérieurs : « Personne n’est plus arrogant envers les femmes, plus agressif ou méprisant, qu’un homme inquiet pour sa virilité. » Mais cela fonctionne aussi pour les racistes, les homophobes, les réactionnaires de tous bords. Cela fonctionne pour tous ces groupes humains dominés par des hommes, et ce même si la bêtise s’étend aussi à des représentants féminins se vautrant avec délectation dans l’idée d’un groupe humain qui asservirait tous les autres. Mais pas elles… jamais, elles… elles n’y pensent pas, puisqu’elles sont du côté du pouvoir ; elles n’ont rien à craindre, sans jamais réaliser que si un jour ce pouvoir redevient dominant, elles retourneront à la cuisine et au linge comme toute femme soumise qui se respecte.

 

Je suis féministe, je mourrai féministe et la lutte ne sera jamais finie. Vous n’avez donc pas fini d’en entendre parler, et je le regrette. Car j’aimerai un monde où tout ce que je viens d’écrire est derrière moi, et où tous les êtres enfin, vivent libres d’être ce qu’ils sont et veulent être sans craindre d’être agressés ou tués pour cela, traités en égaux, en respect et en droits.

PS : et le premier qui emploie le mot « fragile » pour décrire une nana, que ce soit moi ou une autre, gagne un ticket pour se faire tanner la tronche à coup d’escarpins ou de baskets, ça dépendra de ce que je porte. Je lui montrerais la fragilité de sa boite crânienne.

http://www.psychee.org/blog/voila-pourquoi-je-celebre-le-8-mars-chaque-annee/